ChitryPaysage dans les vignobles du Grand Auxerrois : Chitry.
©Chitry|BIVB / Aurélien IBANEZ
Chitry

Chitry

Chitry, charmant village viticole aux portes du vignoble de Chablis, séduit par son patrimoine préservé et ses paysages vallonnés. Son église fortifiée du XIIIe siècle, unique dans la région, domine un décor de vignes et de pierre. Entre dégustation de vin et promenade, Chitry est une halte authentique au cœur de la Bourgogne.

Appelé Castriacus au Xe siècle, Chitry-le-Fort doit son nom au mot latin castrum, renforcé par le qualificatif « le-Fort » en référence à son église fortifiée pendant la guerre de Cent Ans. Le village, non ceint de murailles, est situé dans une vallée en entonnoir, ce qui poussa les habitants à transformer l’église en véritable forteresse. Les habitants sont appelés les Chitriens et Chitriennes.

De du Xe au XVIIIe siècle, le bourg de Chitry était divisé en deux fiefs distincts : Chitry du Dessus et Chitry du Dessous. Ces deux seigneuries rivales étaient séparées par l’église, construite entre les deux communautés. Officiellement, l’église était rattachée à Chitry du Dessous, donc au Duché de Bourgogne.

Le côté sud, Chitry du Dessus, relevait de la comté de Tonnerre et du duché de Champagne. Le côté nord, Chitry du Dessous, était protégé par les comtes d’Auxerre et le duché de Bourgogne. L’actuelle rue principale du village marquait symboliquement la frontière entre les deux territoires.

Cette division donna lieu à de nombreux conflits entre les habitants, notamment à propos du commerce du vin et des inégalités fiscales d’un fief à l’autre. Ce n’est qu’avec les États généraux de 1789 que les deux fiefs furent réunis pour former un seul village : Chitry-le-Fort.

L’église Saint-Valérien

C’est sans doute l’église la plus emblématique du département de l’Yonne ! Son imposant clocher-donjon est surmonté d’un superbe hourd en bois. Son nom fait écho à l’histoire du diocèse d’Auxerre, puisque Valérien fut le troisième évêque d’Auxerre. Une première construction cultuelle aurait été édifiée sur ses fondations dès le VIe siècle. Des fouilles ont mis au jour plusieurs sarcophages mérovingiens autour de l’édifice.

Des traces archéologiques attestent ensuite de la construction d’une église romane au XIIe siècle, profondément remaniée au fil des siècles, puis fortifiée au XIVe siècle. La région de l’Auxerrois, soumise à de nombreuses invasions du Moyen Âge à la Révolution, voit alors Chitry faire le choix de fortifier son église plutôt que de construire des remparts autour des deux fiefs rivaux.

L’architecture actuelle date en grande partie de la fin du XIIIe et du XIVe siècle. La nef, édifiée au XIIIe dans un style gothique, comporte quatre travées voûtées d’ogives. Le chœur, le chevet et le déambulatoire datent du XIVe siècle, tout comme le clocher, situé au nord-ouest du bâtiment. Ce dernier comporte trois niveaux et un porche roman.

En 1364, l’église était flanquée de quatre tours et entourée d’un profond fossé, aujourd’hui comblé. Deux de ces tours ont disparu, mais le donjon et la tour carrée sont encore visibles. Contrairement à d’autres villages où les églises faisaient partie d’un ensemble défensif, Chitry choisit de fortifier uniquement son édifice religieux. Avec ses tours et son donjon, l’église jouait alors un véritable rôle militaire au cœur du village, en période de conflit.

Le donjon

Accolé au chevet de l’église Saint-Valérien, on remarque immédiatement la massive tour-donjon haute de 12 mètres, caractéristique des églises fortifiées bourguignonnes. Elle est équipée de mâchicoulis, de meurtrières et d’ouvertures pour canons. Juste sous la toiture se trouve une structure en bois, permettant aux gardes de défendre l’édifice à distance et à sa base.

Ce type de construction est appelé hourdage : il s’agit d’un petit chemin de ronde en bois, fixé à l’extérieur du mur, qui forme une galerie défensive suspendue. Grâce à des trappes percées dans le plancher, on pouvait jeter des projectiles sur les assaillants situés au pied de la tour, empêchant ainsi toute tentative d’escalade.

L’accès au donjon se fait par le chœur de l’église, via la sacristie, aménagée au rez-de-chaussée de la tour. Le donjon comporte cinq étages au-dessus d’un rez-de-chaussée voûté. On mentionne également l’existence d’un niveau souterrain avec des cachots, auquel on ne pouvait accéder que depuis l’intérieur. Ce souterrain était connecté à un réseau de tunnels menant aux vignes, servant potentiellement de voie de fuite.

Les cloches

Au XVIIe siècle, deux cloches étaient en service dans le clocher de l’église Saint-Valérien.

La première, une grosse cloche de 1 500 kg, portait le nom de « Valérienne » et servait à sonner les offices religieux ainsi que l’alarme.
La seconde, plus légère, s’appelait « Jeanne » et pesait environ 600 kg.
Ces deux cloches ont résisté aux intempéries pendant de nombreuses années. Cependant, un accident tragique est rapporté en 1650 : un enfant a été tué par la chute du battant d’une des cloches. À la suite de ce drame, les cloches ont été mises en sécurité.

L’église Saint-Valérien aujourd’hui

Après la guerre de 1914, la paroisse a ajouté trois petites cloches dans le clocher de Chitry. Suite à la Première Guerre mondiale, la grande cloche « Valérienne » s’est fissurée. La décision de la refondre ne fut prise qu’en 1937.

En 1941, la foudre s’abattit sur le clocher, provoquant un incendie. La toiture de l’église fut complètement détruite, mais les cloches ne furent que partiellement endommagées.

En 1951, les fonds nécessaires furent réunis pour reconstruire la charpente du clocher.
En 1968, la petite cloche « Jeanne » fut refondue grâce aux dons des bienfaiteurs, et le système de sonnerie fut électrifié.

Depuis 2023, les cloches de l’église de Chitry ne sonnent plus, pour des raisons de sécurité.
Le clocher carré, au niveau de la charpente qui supporte les cloches, présente une forte fragilité structurelle.

Chitry, un vignoble entre Chablis et Auxerrois

Le village de Chitry occupe une place importante dans le paysage viticole de l’Auxerrois. Il s’agit même de la troisième appellation la plus importante de la région, et a été labellisé « Village Vignoble Remarquable » en 2003.

La culture de la vigne y est ancienne : dès la Renaissance, le commerce du vin permettait aux jeunes hommes du village de partir à Paris et de s’y faire enregistrer comme bourgeois de Paris. Ce statut leur apportait certains privilèges et leur permettait notamment d’exporter les produits de Bourgogne et du département de l’Yonne vers la capitale.

Le vignoble de Chitry bénéficie d’un climat très similaire à celui de Chablis. Environ 50 hectares sont consacrés à la production de vins blancs à base de chardonnay, tandis que 30 hectares sont plantés de pinot noir, pour les vins rouges.
Le sous-sol chitrien repose sur des couches kimméridgiennes datant du Jurassique supérieur (environ 140 millions d’années).
Ce sol argilo-calcaire est célèbre pour sa richesse en fossiles marins, coquillages et ammonites, témoignant de l’époque où ce plateau était encore recouvert par l’océan.

Située à flanc de coteau, la commune de Chitry bénéficie d’une double exposition nord-ouest et sud-est, idéale pour la maturation des raisins.

Le Kimméridgien, qu'est-ce que c'est?

Le Kimméridgien est une époque géologique du Jurassique supérieur, datant d’environ 150 millions d’années.
Les sols issus de cette période sont composés de marnes et de calcaires contenant des fossiles d’huîtres, qui jouent un rôle clé dans la minéralité des vins de la région.